Sans jamais l’avoir écrit explicitement dans Pédagogie du jeu (première édition 1989) bon nombre de lecteurs ont rapidement interprété mon premier écrit sur la pédagogie du jeu comme devant de facto s’adresser aux personnels travaillant uniquement avec les enfants.
À cette époque, notre discours, favorisait probablement cette interprétation pour le moins restrictive. Est-ce dû à la nouveauté du discours ou au manque de précision du sujet? On peut croire que les deux en furent la cause.
Notre vision de l’acte pédagogique, notre perception des choses, notre philosophie de vie embrassent beaucoup plus grand. L’enfant oui d'abord, mais pas seulement lui, pas uniquement lui!
Il fallait rétablir les faits et pour se faire retourner à nos sources de réflexions. D’abord Huizinga dans sa réédition de 1976, affirme que le jeu est une action libre qui ne peut être commandée. Il ira jusqu’à prétendre que le jeu serait une activité plus ancienne que la culture.
Cailliois (1958) soutient que le jeu est un phénomène total étroitement lié à la globalité de l’être en action. Cailliois va jusqu’à prétendre que cette occupation qu’est le jeu est isolée du reste de l’existence et qu’elle s’accomplit en général dans des limites précises de temps et de lieu.
Puis Aveline (1961) nous amène sur des dimensions référentielles très précises en regard du jeu. Sans nier les constats d’Huizinga et de Cailliois, il ira jusqu’à énoncer que l’homme jouait avant même le péché originel. Le jeu dit-il, est un acte structuré logique et rigoureux. C’est par le jeu que l’homme peut entrer dans un monde bien fait qui l’amène jusqu’aux frontières de l’irréelle.
Ces grands auteurs se sont penchés sur le rôle du jeu dans la civilisation et ils l’ont fait en regardant l’homme. Ils alimentent depuis toutes nos réflexions, notre philosophie et notre vision du jeu dans l’acte pédagogique. Ils savent nous rappeler et nous confirmer que l’homme de tous âges... joue!
Si nos premières réflexions sur le jeu et sur sa dynamique pédagogique semblaient se limiter aux enfants, ce n’était que par une sorte de naïveté de notre discours. Un discours non seulement naïf auquel il faut ajouter un brin de faiblesse argumentatif et d’expérience concrète avec des adultes-joueurs. C’est ce qui fit limite à notre réflexion et à l’exercice de jouer plutôt que d’en faire une philosophie d’apprentissage compatible pour tous.
Le temps, qui arrange bien les choses, à fait son travail, de réflexion que nous proposions dans Pédagogie du jeu, nous en somme à en définir une philosophie qui sait desservir plusieurs maîtres: les enfants, les ados, les adultes et les sages.
Nouvelle tendance qui respect mieux le propos de ceux qui nous ont précédés et montrés la voie et la vraie nature du jeu. Ceux-là mêmes qui ont étudié l’homme adulte et ses péripéties.
À travers les époques et l’histoire de l’homme tout comme l’ont fait Huizinga, Cailliois et Aveline, nous regardons ce qui a fasciné l’homme au point où il fera d’un besoin impératif à la survie ou d’une ordonnance sociale un acte purement ludique... un simple jeu!