21 avril 2007

COMMENT ON EN ARRIVE!!!!

Comment on en arrive à définir cette pédagogie du jeu???
C'est un long cheminement qui est né d'un besoin dans l'enseignement aux enfants différents.
Voici donc la petite histoire de PÉDAGOGIE DU JEU... PHILOSOPHIE LUDIQUE...
Au Québec, nous avons eu ce que les historiens ont appelé « la grande noirceur ». Une période où le dictateur de l’époque croyait qu’un peuple instruit est un peuple ingouvernable. Je suis en fait un enfant né à la fin de cette fin de grande période.

« La Révolution tranquille » va donc favoriser les gens à s’instruire et surtout les enfants (donc, je suis!) pour une meilleure qualité de vie.. Cette attitude ouvrira donc la porte à toute espèce de gourou qui annonce une révolution des mœurs y compris éducative.

On accueille sans trop de discernement toutes les méthodes, on chamboule l’éducation classique, bref rien ne sera pareil et tout sera sujet au questionnement.

Jusque-là, les enseignants devaient avoir une 12e année d’étude et faire les 2 ans d’école normale qui leur apprenait la gestion administrative d’une classe. À cette époque, on commençait légèrement à parler d’un certain Piaget, mais lui aussi était en formation.

Comme il faut que tout cela change on fera table rase dans tous les domaines! Dorénavant l’enseignant devra avoir 12 ans d’études générales et faire 4 autres années à l’université dans un baccalauréat à vocation spécifique soit : pour enseigner au primaire (pour 6 années) soit pour le secondaire (d’une durée de 5 années) et on invente les CEGEP collège à deux vocations professionnelle (3 ans) ou scientifique qui ouvrent les portes de l’université (4 ans)

Puis, dans ce grand ménage, on découvre ou bien devrais-je dire on redécouvre qu’une petite partie de la population vit en réclusion dans des institutions tenues par des religieux : les hôpitaux psychiatriques. On y trouvera de tout!

Quant à moi j’arrive à la fin de mes études dans ce grand tourbillon se « grand ménage du printemps » comme se plaise à le dire les caricaturistes.

Devant les découvertes faites dans les institutions psychiatriques on ajoute un volet aux sciences de l’éducation à l’université un Bac en orthopédagogie que je ferai après un Bac général

On nous forme au jour le jour avec une abondance de recherches de tout acabit, venues des USA, de Suède ( qui sont plus près de la nouvelle mentalité du québécois) et bien sûr de l’Europe!

À ma sortie de l’université je vais donc assumer une tâche d’enseignante auprès d’enfants déficients intellectuels moyens, mais en fait les critères sont si larges qu’on englobe du léger avec troubles de comportements au profond.

C’est dans ce contexte que je découvrirai la thérapie par le jeu et que convaincu de son utilité je m’y attarderai parce que j’avais l’impression que l’on peut l’utiliser en pédagogie. C’est alors, qu’ à mon insu, du moins au tout début je vais entreprendre une longe recherche qui fait maintenant près de 25 ans.

Je ne suis partie de rien sinon de publications qui faisaient plus état de l’aide que le jeu et le jouet apportaient à certains enfants retardés (disait-on à ce moment). Des titres comme DIBS d’une psychanalyste américaine Axline, LA GUERISON PAR LE JEU de Pulles, LE PSYCHODRAME CHEZ L’ENFANT de Widlöcher, etc.

Puis ce fut la découverte la plus marquant qui de fait fut le moteur de ma recherche c’est HUIZINGA avec son Homo Ludens (1976) qui m’a donné les éléments de réponses que je devais chercher.

C’est ainsi que je me suis mise à lire et à essayer de comprendre tous tous tous les termes dans la littérature depuis les écrits sur les enfants sauvages du début du 20e siècle en passant par toutes les théories tant pour l’enfant dit normal que pour l’handicapé de tout genre. Je ne voulais pas sélectionner un courant plus qu’un autre. Je voulais savoir comment mes prédécesseurs voyaient le jeu et le jouet, comment ils l’utilisaient et surtout comment les enfants, les ados et les adultes l’utilisent.

C’est alors en faisant des fiches sur chacune de mes trois cents quelques lectures que j’ai pu constater que les auteurs parlaient de trois niveaux de jeu bien différents et que cela avait été bien assimilé par Huizinga avant même qu’on écrive le tout entre les années 1975 et 1985. Il y avait bien eu un premier congrès international sur LA VALEUR DU JOUET ÉDUCATIF en 1958, mais ici au Québec cela n’a pas eu preneur!

Par contre en 1987 à l’Université du Québec à Montréal on fit un premier colloque JEUX ET APPRENTISSAGES et là nous avons vu pendant trois jours d’a filés plein de théories, pleins de milieux qui utilisent le jeu du moins au Québec et certains états américains.

Avant d’oser publier PÉDAGOGIE DU JEU je me devais de mettre les bases de la pédagogie et pour se faire je devais comprendre ce que les écrits sur le jeu de tous les coins du monde voulaient dire et c’est ainsi que j’ai unifié les discours pour en faire trois volets LUDIQUES, ÉDUCATIFS, PÉDAGOGIQUES. Maintenant on peut savoir la valeur de chaque intervention.

Si on regarde l’après-guerre avec la venue de Fernand Nathan en entre autres, on voit qu’il y va combler un besoin surtout au Québec, car la loi de l’instruction publique va forcer les enfants, qui sont déjà dans des manufactures, à venir à l’école d’abord. Se qui n’ira pas de soit et les écoles des années 1945-50 sont tenues par des religieux qui avaient l’habitude de petites classes avec des enfants de notables triés sur le volet. Alors que du jour au lendemain les classes se remplissent à craquer et les enfants qui n’ont pas eu d’apprivoisement à la culture et à l’éducation n’ont pas beaucoup de motivation. Quoi faire? C’est ainsi que les communautés religieuses ayant encore des liens avec leur maison-mère en France recevront des jeux de Nathan qu’il va identifier JEUX ÉDUCATIFS! Le sont-ils vraiment? Comment peuvent-ils servir l’apprentissage?

On ouvre vers les années 1965 des classes spéciales pour les enfants qui « n’apprennent pas » disait-on. Puis cela devenant de plus en plus lourd et le gouvernement étant plus pro-actif on décide de faire non plus que quelques classes ici et là, mais des écoles à vocation particulière. C’est le mouvement qui va permettre de sortir des institutions les déficients mentaux. J’arrive en 1970 dans ce grand mouvement fraîchement sorti de l’université. On ne sait pas quoi faire? Honnêtement! L’université étant interpellée par le Ministère de l’Éducation, elle nous offre un bac en orthopédagogie dont les profs sont à la faculté de psycho et tantôt donne des cours en ortho. La pédagogie, ne connaît pas! C’est ainsi que je suis formée par des psys de tous genres. Heureusement par la suite et rapidement notre génération qui ira jusqu’aux études supérieures va remédier à tout cela en devenant par ce manque, des chercheurs inconditionnels.

De la psychanalyse et de la psychologie j’ai retenu leur façon de travailler qui m’a amené à des formes moins directes d’apprentissage et à chercher à savoir s’il y avait d’autres formes de pédagogies. J’en ai trouvé comme la pédagogie de l’indirecte, la pédagogie par projets, la pédagogie du mastery learning la pédagogie de la non-intervention, la pédagogie personnalisée, etc.

Je ne sais pas si j’ai eu des théories plus inspirantes que d’autres, car en fait, mis à part Huizinga, j’ai cherché plutôt à comprendre pourquoi certains auteurs disaient d’un jeu qu’il éduquait, qu’il devait apprendre les concepts, que les notions doivent être apprisent que l’enseignement ne peut se faire qu’avec des jeux pédagogiques, que le jeu est dangereux « il met l’ennuie dans le plaisir et la frivolité dans l’étude » Mme Staël.

Pourquoi Huizinga parlait de ludique et que l’école n’en disait rien? Pourquoi si le jeu est le principal travail de l’enfant il ne l’utilise pas à l’école? Pourquoi si on joue jusqu’à sa mort, on ne doit pas rire dans une réunion? Pourquoi mes élèves déficients intellectuels ont le droit que de jouer aux puzzles, au légo et je ne sais quoi encore… parce que cela les occupe sans déranger le milieu? Et si on pouvait allier le jeu et l’apprentissage, car c’est ce qui est dit pour les petits enfants et que devenu l’enfant d’âge de la maternelle nous avons un double message et pire encore, car plus il grimpe dans la hiérarchie du savoir moins il a le droit de jouer!

C’est ainsi que j’ai pu faire émerger la pédagogie ludique.

La pédagogie du ludique est en fait rien de moins que l’application d’une philosophie de vivre qui autorise l’individu à apprendre par tous les moyens possibles, et cela, à son rythme.

La pédagogie du ludique exige de celui qui la met en pratique une grande connaissance des apprentissages qu’il veut faire faire de un, puis de biens définir ses objectifs et là c’est le gros du problème. L’apprentissage par le jeu peut devenir non pas un moyen pédagogique, mais une sorte de mélange, de je-m’en-foutisme si les objectifs ne sont pas bien définis, pour en quelque sorte encadrer l’apprenant dans sa démarche qui peut avoir plusieurs axes. Puis il permet à l’enseignant d’observer le joueur et sa démarche et de lui apporter systématiquement des supports, des correctifs ou de l’aider. Il permet de plus de suivre l’apprenant et non de le devancer dans son apprentissage respectant sa phase de latence comprise entre l’appris et l’acquis.

La pédagogie du ludique comme vous le voyez est née des principes qui sous-tendent la majorité des pédagogies sauf qu’elle focalise UNIQUEMENT sur l’apprenant et son rythme.

Une fois cela dit il faut aussi comprendre qu’elle est un des moyens dans la valise de l’enseignant et qu’elle ne règlera pas tout. Apprendre ses tables de multiplication restera toujours fastidieux, on aura beau les réciter les pieds au plafond et la tête dans des coussins l’effort reste le même et le moyen des apprendre est de les mémoriser!

La pédagogie du ludique comme tout autre forme de pédagogie à ses forces et ses limites. Elle convient à certains et peut déplaire à d’autres. Elle peut aider à mieux saisir certaines notions, certains concepts comme d’autres pédagogies peuvent le faire il lui faut par contre deux axes solides :
1. un pédagogue voué à sa philosophie et qui comprend très bien les enjeux donc que cette façon d’aborder l’apprentissage lui colle à la peau
2. elle procède par détour, par de l’indirect c’est-à-dire que l’apprenant n’est pas ou peu conscient du but visé. Ainsi tout au long de son « jeu » aura-t-il droit à toutes les découvertes que le pédagogue n’aura peut-être pas perçu. Ce qui, pour l’apprenant lui donnera un large éventail de connaissances.

Nous en sommes là et les questions nous ont aidés à clarifier cette démarche